Les loups et les villes, ça ne fait pas bon ménage? [free]

(Bon ben, je me lance... XD; )

Je n'aime pas Thorn. Le moins qu'on puisse dire c'est que cette région pue. Ca pue la transpiration humaine, l'urine de vache, la bouse et d'autres odeurs difficiles à identifier.
Quand on était encore en rase campagne, ça restait supportable mais Heregsveld est tout simplement putride. Pour tout dire, je ne peux même plus respirer par le nez sans avoir envie de vomir et je suis obligé de respirer la bouche ouverte comme un idiot. Sans compter le magnifique teint verdâtre que je dois avoir là tout de suite.

Il y a trop de monde, trop d'odeurs, trop de bruit! Entre les marchés, les forges et les bourdonnements dans le ciel, j'ai du mal à m'entendre penser...

Si au moins Anette ne me collait pas autant, je pourrais m'éloigner du groupe et ressortir de là mais non! J'avais supposé qu'elle nous laisserait une fois atteinte la capitale, après tout je lui ai donné suffisamment pour y survivre non?

"Hum... excusez-moi mais... je pensais que vous voudriez commencer une nouvelle vie ici?"

A supposer qu'on puisse ou veuille vraiment vivre dans un cloaque pareil...
Un regard de merlan frit à Raven devant moi n'y changera rien, je le sais mais je ne peux pas m'en empêcher. Néanmoins, il ne m'est d'aucun secours sur le moment. Selon l'écuyer, je l'ai bien cherché. Je ne comprends pas pourquoi ceci dit, je n'ai fait que faire ce que n'importe quel Kelkarn dans ma situation aurait fait... non?

Anette ne semblait pas particulièrement prête à quitter son sauver. Après tout, qui sait ce qu'il pouvait lui arriver une fois livrée à soi même dans cette grande cité d'Heresgvelt. Si grande, si effrayante. Les rues étaient étroites et les bâtiments semblaient se défier entre eux pour savoir celui qui se rapprocherait le plus de ces étranges machines volantes dans le ciel. Comment s'appelaient ces oiseaux artificiels déjà...? Sa mère lui en avait parlé...des zettelins, quelque chose comme ça.

"Oui, vous avez raison, Seigneur. Mais il me faut d'abord trouver un semblant de stabilité...vous comprenez, je ne peux pas m'installer seule et sans travail. L'argent que vous m'avez gracieusement donné finira par fondre et je serais bien embêtée de ne pas avoir de mari participant aux finances. De plus, je ne suis que peu de choses face à la force d'un homme et je ne veux pas revivre à nouveau ce qui s'est passé avec ces..ces chevaliers. Comment pourrais-je me défendre si cela devait se réitérer ?"

La jeune femme jeta un regard suppliant au Kelkarn. Anette n'était certes pas particulièrement belle mais elle savait papillonner des yeux et prendre une petite moue enfantine quand les circonstances l'exigeaient. Anso osera t-il abandonner cette pauvre créature à son sort, entre les griffes d'un monde impitoyable ?

Raven ne vit pas le regard de merlan frit que lui servit Anso derrière lui. Il était déjà accaparé par la vision que lui offrait les… choses bizarres présentes dans le ciel. Il n’avait jamais rien vu de tel, que n’allaient-ils donc pas inventer ces humains ?!! Pire que des nains ! Au moins un nain n’aurait jamais l’idée saugrenue de vouloir construire un engin volant, ça non ! Il se focalisa sur les deux ou trois mouettes qui fendirent le ciel. Les mouettes, c’étaient bien ça… plus naturel au moins. Comment faisaient les oiseaux pour cohabiter avec ces choses-là ? Etranges créatures que ces humains, entre ça et les arbres cubiques… Puis, pouah ! Ca empeste ici ! Et tout ce bruit ! A vous coller une de ces migraines des enfers ! L’elfe attrapa un bout d’étoffe et s’en servit de cache nez. Au moins, cela sentirait un peu moins fort. Mais comment diantre faisaient-ils pour vivre là-dedans ? Trop de gens, trop d’odeurs, trop de bruits et de bousculades. Heureusement qu’il était à cheval, pauvre bête d’ailleurs. Il lui flatta amicalement l’encolure pour peine.
Il se retourna en entendant Anso et Anette discuter. Pauvre Kelkarn, il s’était attiré les faveurs d’une bien drôle de demoiselle !

Bien que ça soit totalement involontaire, je me sens faire la moue... Si Annette tenait tant que ça à avoir un mari, pourquoi ne pas le prendre tout simplement? C'était quoi ces histoires encore là?
Annette papillonna des cils, ce qui me fit papillonner des cils en retour dans un geste de totale incompréhension. Qu'était-ce donc? Elle avait quelque chose dans l’œil?

"Allons, vous avez certainement des qualités que vous pourrez troquer contre de l'argent, j'en suis persuadé... quant au mari et bien... si vous n'êtes pas assez confiante en vous, vous n'en trouverez jamais un digne de ce nom. Je peux vous aider dans votre quête, mais vous devez savoir que je ne reste jamais bien longtemps au même endroit... donc il nous faudra faire vite."

Raven s'était tourné vers nous et ma moue s'amplifia. Mon appel à l'aide serait-il assez parlant ainsi ou fallait-il me mettre à couiner? Non, couiner, c'est pour les petits... la moue suffira. Et si l'appel à l'aide ne passe pas, tant pis, il faudra que je me débrouille.

"Dites-moi tout. Que savez-vous faire Annette?"

Annette avait la sensation de s'être pris une dague en plein coeur. Tout ses espoirs avaient été pulvérisés en un court instant. Son sauveur ne semblait pas l'apprécier.
Qu'est ce qu'elle avait de moins que les autres ?
Il parlait de confiance. Mais comment pouvait-elle avoir confiance en elle après les évènements de la taverne du Sinaise ? Comment pouvait-elle avoir confiance en elle alors qu'elle avait été élevée comme une jeune fille humaine moyenne, destinée à se trouver le plus vite possible un mari duquel elle dépendrait ?
Le destin était tellement cruel, égocentrique. Il lui avait amené ce jeune homme roux pour mieux la leurrer, dans l'unique but de la faire tomber de plus haut. Au final, elle était dans la capitale de Torne mais plus seule que jamais. Abandonnée. Délaissée. Pauvre chose. Les larmes montaient. Elle se força tant bien que mal à les contenir. Sa voix était brisée quand elle reprit la parole.

" Vous...ne voulez pas rester auprès de moi. C'est...parce que je ne suis pas assez attirante pour vous ? Je sais préparer à manger et euuh...faire le ménage...et...et..."

Annette avait visiblement bien du mal à réunir ses esprits. Au fond d'elle, elle se savait inutile. Elle avait toujours été le peu de ce qu'on attendait d'elle. Ni particulièrement belle, ni particulièrement intelligente.

Ca y est, je sens que mes sourcils sont partis s'évader vers le haut de mon crâne et je dois avoir une tête d'ahuri en plus de tout le reste maintenant.

"Comment? Non... non... méprenez-vous... seulement je n'attends pas d'une femme à ce qu'elle reste au foyer mais plutôt qu'elle sache m'accompagner glaive à la main dans d'épiques chasses aux fantômes et bêtes sanguinaires..."

Tenter de me dépatouiller comme je peux... comment j'ai pu en arriver là? Je n'ai rien demandé moi! Qu'est-ce qui a bien pu lui faire croire qu'elle m'intéressait?
Bon... la clé c'est respirer, je sais... mais c'est difficile dans cette ville...

"... et je crois que ce n'est pas une vie pour vous. Pour très peu de femmes en fait à vrai dire. Vous, vous méritez une vie tranquille avec un gentil mari qui rentrera tous les soirs."

Elle ne va pas se mettre à pleurer quand même... si?

" Annette... J'ai été amoureux d'une jeune fille il y a peu... et... elle est morte. Je ne veux pas refaire la même erreur deux fois."

Annette écoutait Anso s'expliquer, sans grand espoir. Oui, il ne voulait pas d'elle. C'est ce que l'on devait retenir d'un discours si embrouillé. Une nouvelle fois, la petite Annette n'était pas à la hauteur, elle ne le serait jamais. Son paternel n'avais cessé de lui répéter. La résignation flirtait dangereusement avec la colère dans son esprit.
Elle en voulait au monde entier d'être née si inapte.

"Une femme...partant à la chasse aux... fantômes et aux bêtes sanguinaires ? Vous ne trouverez que des femmes normales à Torne, pas des brutes !"

Sa voix témoignait d'une irritation teintée de désespoir. Elle savait qu'elle ne pouvait plus rien faire, surtout pas s'emparer d'un coeur déja pris.

" Je suis amoureux d'un jeune homme et il est devant moi, bien vivant ! Seulement il ne voudra jamais de moi. Qui d'ailleurs voudrait d'Anette ? La laide et stupide Anette ? Il faudrait au moins être aussi abject qu'elle pour consentir à sa présence. Je devrais tenter ma chance avec un lépreux, en admettant qu'il soit aveugle."

Elle ne laissa pas Anso répondre et prit la fuite, manquant de trébucher au passage.

Mais que...quoi? Mais non pas du tout! Je n'ai jamais dit quoi que ce soit du genre enfin!
Je pars donc à la poursuite d'Anette, je ne voudrais pas qu'il lui arrive malheur par ma faute après tout... on ne sait jamais sur quoi on pouvait tomber dans des endroits comme celui-ci!

"Attendez! Ne partez pas toute seule, c'est dangereux!"

Curieusement, je n'arrive pas à rattraper la jeune femme et je me retrouve perdu au milieu de la foule comme un imbécile après une course poursuite d'une bonne dizaine de minutes.
Un regard en arrière et je constate que je ne sais pas du tout où je suis...

"Misère!"

Perdu... je suis PERDU!